En quête du Saint 8a est à Calanques de Marseille

Étape 25/26: Paroi des Toits & Roquevaire

En ce moment, je suis dans une excellente phase. Je me sens bien. J’ai (on m’a fait) réalisé que le projet marchait, et marchait même très bien. Tu sais, quand tu as la tête dans le guidon tu as tendance à ne pas forcément t’en rendre compte. Mais enchaîner un 8a tous les jours, dans des falaises et des profils à chaque fois nouveaux, tout en ayant fait 80km de vélo la veille et en dormant dehors ; c’est plutôt un bon signe. Et cela, après 4 mois de voyage, 2300km au compteur, déjà 29 8a enchaînés, et beaucoup d’épreuves surmontées. Piouf. Je crois qu’on peut dire que le projet est une réussite. En termes d’escalade, c’est la plus grosse performance de ma vie jusqu’à présent. Et en termes d’humain, je rayonne. Je suis plus en forme que jamais, je ne me suis pas blessé et je déborde d’énergie. Me rendre compte de tout ça me motive tellement pour les 2 mois qu’il me reste. Je suis là, dans le présent, et je me sens léger.

Étape 27 – Orgon

Orgon, c’est là qu’il y a Le Bronx, premier 8c+ français (François Petit, 1994). Ceux qui ont entendu parler d’Orgon, c’est généralement pour cette voie. Mais c’est une autre histoire, car je n’ai pas été voir le secteur historique. Éh oui, il y a plein d’autres petits secteurs à Orgon. Et après avoir discuté avec les locaux, c’est dans le secteur Satyre bleue que je trouverai le plus beau 8a du coin. C’est ça qui est génial avec le déplacement à velo: c’est que je passe et m’arrête dans des coins moins explorés, d’après les (mé)dires et les conseils des locaux. Bonne manière de découvrir les pépites cachées!

Étape 28 – Mouriès

Mouriès, face nord, 22h. J’installe mon bivouac pour la nuit. Un mistral violent souffle par rafale. On m’avait prévenu que c’était hardcore de grimper ici en hiver, mais ma motivation n’en a que faire. Je suis venu essayer une voie: Fleur de Rocaille. Ma tente déployée, je me penche pour attraper les sardines. A peine retourné, je vois une masse blanche s’envoler dans l’obscurité. Nooooooon! Ma tente! Elle s’en va faire sa vie au loin, au gré du vent. Je cours après et finis par la récupérer en haut d’un arbre. Elle est en mauvais état: les arceaux sont cassés. Bon, plan B: construire une palissade et dormir à la belle. Autant dire que la nuit s’annonce agitée

Fleur de Rocaille, c’est le premier 8a féminin par Catherine Destivelle, ensuite décoté à 7c et puis recoté à 7c+. Probablement le 7c+ le plus 8a de toutes les Alpilles. Très à doigt et bien technique, c’est réputé exigeant. Autant dire qu’il faut y aller affûté. Pas facile après une telle nuit et le fond de fatigue qui me traine constamment dans le corps. Mais bon, il ne faut pas oublier que ça fait partie du jeu! Je suis quand même très content d’avoir pu faire une montée et quelques belles sections! Je reviendrai pour l’enchaînement car c’est un petit bijoux

Étape 30 – Claret

C’est marrant comme en itinérance tu es constamment en train de faire sécher des affaires. Que ça soit pour se débarrasser de l’humidité du bivouac ou d’une lessive express chez un hébergeur passager, le moindre rayon de soleil est un appel à étaler tes affaires. On a tendance à l’oublier mais avoir des vêtements secs et propres c’est une nécessité. Car au delà du style (essentiel je sais) c’est eux qui te font sentir confortable au quotidien

Je crois que je n’ai pas passé assez de temps à Claret pour apprécier ce rocher bizarre à grimper. J’ai juste rapidement fait le classique Double Nelson 8a , plutôt chouette pour son atypicité. Mais par contre, j’ai beaucoup aimé étendre ma lessive à côté de Seb Boin et Théo Blass qui mettaient des runs dans leurs projets respectifs!

Étape 36 – Saint-Géry

J’adore conduire. Des voitures.

Quand je suis arrivé dans le Lot il y a 3 semaines, j’étais fatigué. Fatigué de donner tant d’énergie pour tout. Quand tu voyages seul à vélo, si tu ne te bouges pas pour quelque chose, et bien il ne se passe rien. Tout dépend constamment de toi. C’est une grosse charge mentale. Un jour, on m’a proposé d’emprunter une voiture pour aller grimper. Je me suis retrouvé tout seul au volant de ce confortable habitacle. C’est si facile. Plaisir coupable. Après 5 mois (casi) sans essence, j’ai eu l’impression de trahir mes valeurs, mais surtout Gaspar

C’était très étrange. Je me suis vraiment senti mal de conduire, alors que des millions de personnes sur la planète le faisaient au même moment. Est-ce que ça voulait dire que je reniais mes valeurs? Que je n’étais pas capable de les porter à 100%? Ou que au contraire, faire un pas sur le côté me rappelait à quel point elles sont importantes pour moi? Je pense que c’est très difficile de tout le temps les assumer quoique l’on fasse. Voir impossible. Et selon moi, c’est ok. Le tout est d’en être conscient et d’essayer de faire au mieux en trouvant un équilibre entre ses envies et ses besoins. De s’écouter tout en étant en accord avec ses valeurs. Et éventuellement, faire évoluer ses besoins petit à petit

Ps: malgré tout ça, la fatigue aura eu raison de moi. Pas de 8a pour cette fois!